Historique de la scission : acte I

Effervescence durant l'année 2004 où le gouvernement Verhofstad II mettait la dernière touche au nouveau plan de structure de la SNCB. Petit florilège de la presse d'époque. (voir aussi la seconde réforme 2012)

La Libre - Mis en ligne le 21/04/2010
Pour se conformer aux prescrits de la Commission européenne qui exigeait une séparation entre le gestionnaire d’infrastructure et l’opérateur, la Belgique a changé la structure de l’ex-SNCB unitaire. Ainsi ont vu le jour en 2005 l’opérateur SNCB (il a gardé le nom et le logo SNCB) et Infrabel. Pour rassurer les syndicats qui craignaient une évolution différente du statut du cheminot et la fin du dialogue social, le fédéral a créé une Holding SNCB, actionnaire à 92,66 % d’Infrabel (7,34 % pour l’Etat fédéral) et à 100 % de la SNCB. Mais il a le monopole des droits de vote dans les 3 structures qui sont des sociétés anonymes de droit public. Le dialogue social est logé à la Holding qui emploie les quelque 38 000 cheminots et les met à la disposition des filiales : 12 500 pour Infrabel et le reste pour la SNCB. Elle est aussi leur secrétariat social. La SNCB, responsable des trains et de petits points d’arrêt, transporte les voyageurs et les marchandises. Infrabel gère l’infrastructure ferroviaire, sans les 35 grandes gares qui relèvent de la Holding. L’Europe a déjà critiqué le modèle belge, un rapport du cabinet Roland Berger a aussi indiqué qu’un schéma plus simplifié (avec disparition de la Holding) serait plus efficace. Les trois CEO’s ont un mandat de 6 ans qui expire en 2011.

Le Soir - mis en ligne par Bernard Demonty le mardi 25 mars 2003
Le débat sur la régionalisation ou la privatisation de la SNCB risque bien de renaître. Le bureau d'avocats Allen & Overy, consulté par le patron de la SNCB, Karel Vinck, recommande la scission de la société des chemins de fer en six entités distinctes, peut-on lire dans un document de travail daté du 10 février dernier, dont nous avons pris connaissance.
Or, pour les milieux politiques francophones, une scission ouvrirait la porte à la régionalisation, voulue par le Nord. Elle faciliterait aussi un processus de privatisation, refusé par les syndicats.
Chargé de définir la SNCB idéale, Allen & Overy recommande de créer un holding faîtier qui ne serait plus une société anonyme (SA) de droit public, comme actuellement, mais de droit privé . Cela faciliterait, le cas échéant, des partenariats, voire une vente partielle ou totale au secteur privé.
Le holding abriterait cinq filiales. Deux demeureraient des SA de droit public (l'infrastructure et le transport national de voyageurs) et trois seraient également transformées en SA de droit privé, donc privatisables (le transport international de voyageurs, le pôle marchandises et la traction).
Le document précise que ce modèle doit encore être « précisé, voire revu et corrigé ». La direction de la SNCB indique qu'il n'est pas dit que ce modèle sera suivi. Nous avons demandé à divers consultants d'analyser la situation et d'émettre des recommandations. C'est une étude parmi d'autres. C'est loin d'être décidé et loin d'être accepté. N'empêche, le monde politique francophone s'inquiète.

Le patron de la SNCB a consulté un bureau d'avocats.
Une étude du cabinet d'avocats international Allen & Overy recommande la scission de la SNCB en six entités distinctes. Actuellement, la société nationale est un groupe uni. Toutes les activités sont logées au sein d'une même structure juridique.
Le patron de la SNCB, Karel Vinck, souhaite toutefois proposer au futur formateur du gouvernement une importante réforme, destinée à améliorer l'efficacité de l'entreprise.
A cette fin, il a confié des études à divers consultants, parmi lesquels le bureau Allen & Overy.
Dans son étude, dont nous avons pu prendre connaissance, le consultant propose le « modèle idéal » de SNCB. Suivant ce modèle, la société nationale serait, demain, scindée en six entités. La première serait un holding faîtier, qui abriterait cinq filiales. Ce holding prendrait la forme juridique d'une société anonyme de droit privé, c'est-à- dire un régime tout à fait similaire à celui des entreprises privées. Entre autres caractéristiques, ce système permet plus facilement une privatisation, fût-elle partielle, du groupe. Actuellement, le groupe SNCB est une société anonyme de droit public, conçue pour les entreprises d'Etat.

Dans ce nouveau holding seraient logées cinq filiales. Deux seraient des sociétés anonymes de droit public. Il s'agit de l'infrastructure (c'est-à-dire tout le réseau ferré) et l'activité de transport intérieur de voyageurs. Il s'agit, d'après le document, des seules missions que l'on peut qualifier de service public de la SNCB.

Les autres filiales seraient dédiées, respectivement au transport international de personnes, au transport de marchandises et à la traction. Ces filiales revêtiraient la forme juridique de sociétés anonymes de droit privé, facilitant donc une prise de participation d'une société privée, voire une vente pure et simple à un partenaire privé.
Informés de l'existence de cette étude, les milieux politiques francophones estiment qu'il s'agit non seulement d'une porte ouverte à la privatisation, mais également à la régionalisation du rail. Une phrase du document les interpelle à ce sujet. Elle est libellée comme suit : « L'Etat pourrait décider de donner en concession une ligne intérieure spécifique et organiser une procédure d'appel d'offre au niveau européen. La concession pourrait très bien être accordée à un opérateur autre que la SNCB. » Pour certains milieux politiques francophones, on ne peut mieux formuler une porte ouverte à la régionalisation de la SNCB, voulue par la Flandre.


La Libre – mis en ligne par Ph.Lawson le 27 mars 2004
Le personnel relèvera du holding faîtier pour garantir l'unité du dialogue social.
Après des discussions en bout de course, le conseil des ministres a finalement approuvé, via une procédure écrite et sur proposition du ministre Vande Lanotte, le protocole d'accord social et la réforme des structures de la SNCB. La décision signifie l'approbation du plan d'entreprise 2004-2005 (équilibre financier en 2008) et la confirmation de la reprise de la dette (7,4 milliards d'euros) en 2005.
En ce qui concerne les structures, le feu vert fédéral sanctionne la scission de la SNCB en un holding SNCB au-dessus de deux filiales: un gestionnaire d'infrastructure dénommée Infrabel («La Libre» des 24-25/03) et une société d'exploitation ferroviaire (elle gardera le nom SNCB alors qu'on avait évoqué le nom B-Rail). Le nouveau schéma répond au prescrit européen. La notification à l'exécutif européen, l'avis du conseil d'Etat, l'approbation de quelques dispositions légales et la publication au Moniteur devaient être terminés pour fin juillet 2004. Le holding (100pc public) détiendra la totalité du capital de l'exploitant ferroviaire (trafics voyageurs et marchandises) et 50pc d'Infrabel (gestion et entretien de l'infrastructure, exécution de nouveaux investissements d'infrastructure). Les 50pc restants d'Infrabel seront aux mains de l'Etat belge. «Le personnel (38000 cheminots à l'horizon 2005) dépendra du holding qui le mettra à la disposition des deux filiales dont 55 à 60pc pour l'exploitant ferroviaire et le reste pour le gestionnaire d'infrastructure», dit Karel Vinck, patron du rail belge.
La dette reprise par le fédéral sera logée dans un Fonds pour l'infrastructure ferroviaire (FIF), une nouvelle société 100pc étatique et propriétaire de l'infrastructure. Quid de la dette résiduelle (3,5 milliards d'euros) et du patrimoine de l'ex-SNCB? «On le saura en temps utiles», sourit le ministre Vande Lanotte. «Malgré l'accord, il règne une certaine confusion, car on ne sait pas où ira la dette résiduelle et qui aura la propriété du patrimoine (terrains, gares) de la SNCB», analyse José Damilot, patron de la CGSP-Cheminots. La signature du protocole d'accord social est prévue pour 1er avril... 

26mars 2004 : la SNCB de papa a cessé d'exister
Le Soir – mis en ligne par Bernard Demonty le samedi 27 mars 2004
Le conseil des ministres a décidé, ce vendredi (ndlr 26 mars 2004), de scinder la SNCB en trois sociétés. Le visage de l'entreprise publique va s'en trouver largement modifié.

1 Pourquoi scinder la SNCB ?
Dès 2007, le marché du transport de marchandises par rail sera totalement ouvert à la concurrence. Le transport de voyageurs suivra, en 2010. Cela signifie que, demain, la SNCB sera une entreprise ferroviaire comme une autre, qui devra lutter contre des concurrents.
Elle devra donc demander à un organisme la permission de circuler sur les voies belges et obtenir un itinéraire (un « sillon », dans le jargon). Actuellement, c'est la SNCB elle-même qui octroie les sillons. Demain, elle ne pourra pas être juge et partie. Il faut donc créer un organisme indépendant chargé d'octroyer les sillons.
C'est pour cette raison que la SNCB va être scindée. La première filiale (chargée des opérations) devra demander ses sillons, comme toute entreprise, à la seconde. Celle-ci, baptisée Infrabel, devra accepter ou refuser les demandes. Le tout sera chapeauté par un holding.

2 Le personnel des trois entités sera-t-il logé à la même enseigne ?
Les conditions salariales et les statuts du personnel demeurent totalement identiques. D'autre part, les syndicats ont un droit de regard sur le groupe via deux instances. La première, baptisée « comité stratégique », sera créée au sein du holding et sera composée des dix membres du conseil d'administration de ce holding, de six membres représentant les travailleurs de l'entreprise (trois socialistes, deux chrétiens et un libéral) et de trois membres proposés par les trois sociétés régionales de transport.
Il s'agit là d'une instance légale, chargée de veiller à la cohérence sur le plan opérationnel. Les syndicats ont également obtenu la création d'un autre organe, baptisé « comité de pilotage ». Il sera composé des représentants des deux grands syndicats (chrétien et socialiste) ainsi que des patrons du holding et des deux filiales. Il sera chargé d'être « le chien de garde » de l'unité de l'entreprise, d'après les propos d'un syndicaliste.

3 Que devient la dette de la SNCB ?
Comme prévu par les directives européennes, l'Etat belge reprend la dette de 7 milliards d'euros de la SNCB. Celle-ci sera logée dans une société baptisée FIF (Fonds d'infrastructure ferroviaire), détenue à 100 % par l'Etat belge. En échange, le FIF recevra des actifs de la SNCB à concurrence de 7 milliards d'euros. Un problème technique reste manifestement à régler et a été évacué de l'accord gouvernemental. Cette reprise de dette risque de faire passer l'endettement de l'Etat au-delà de 100 % du produit intérieur brut. Or, un accord gouvernemental prévoit que l'Etat ne peut reprendre la dette si elle dépasse 100 % du PIB. Ce problème reste à régler.
Autre problème relatif à la dette : l'Etat reprend 7 milliards, mais la dette s'élève à 10 milliards. Où va atterrir le solde de 3 milliards d'euros ? L'affectation de ces trois milliards n'est pas encore décidée, le gouvernement ayant évacué ce problème de l'accord. En réalité, la filiale de la SNCB qui en héritera sera endettée, et aucune n'est vraiment candidate...

4 La scission fait-elle courir un risque de régionalisation du rail ?
Pour bon nombre d'observateurs francophones, ce n'est pas la scission qui fait courir un risque de régionalisation de la SNCB. C'est le processus de libéralisation du rail. Ce processus permettra demain à n'importe quel opérateur de créer sa propre compagnie ferroviaire. Si elle le décide, la Flandre pourra donc y aller gaiement. Les observateurs estiment que la Flandre n'aura jamais intérêt à créer une société de très grande taille. En revanche, il est très vraisemblable qu'elle sera tentée de loger la desserte des petites lignes régionales flamandes dans une société régionale (qui pourrait être De Lijn).

La Libre – mis en ligne par Ph.Lawson le 16 octobre 2004
La reprise de la dette la spolie de biens évalués à 203 millions. Le fonds RER est aussi raboté.
Sur proposition des ministres Johan Vande Lanotte (Entreprises publiques, SP.A) et Renaat Landuyt (Mobilité, SP.A), le fédéral a avalisé vendredi des mesures (arrêtés royaux) qui vont accélérer la scission de la SNCB (un holding chapeautant l'opérateur ferroviaire SNCB et un gestionnaire d'infrastructure Infrabel): fonctionnement du Fonds d'infrastructure ferroviaire (FIF pour gérer la dette à reprendre), statuts d'Infrabel et de la nouvelle SNCB (opérateur), contrats de gestion provisoires entre l'Etat et Infrabel ainsi qu'entre l'Etat et la nouvelle SNCB, etc.
Le transfert de membres de l'ex-Service technique d'appui ferroviaire (Staf) vers le Service public fédéral Mobilité et Transport a aussi été avalisé. Tout comme les conditions d'utilisation du réseau belge (libéralisation du rail oblige). Ces experts de l'ex-Staf veilleront notamment au respect des règles de sécurité et de l'aptitude du matériel roulant.

Mais l'opération de reprise de la dette (7,4 milliards d'euros) en 2005 lèse la SNCB. Car même s'il est dit qu'elle ne supportera pas les charges d'intérêt de la dette (300 millions d'euros par an), le montage cache des subtilités. Le fédéral va verser 100 millions d'euros au FIF en 2005, mais il oblige la SNCB à apporter au FIF du patrimoine: 40 terrains évalués à 116 millions, le site de Schaerbeek-Josaphat (60 millions d'euros), le bâtiment Delta sis rue de France (27 millions d'euros). Si la valorisation ne rapporte pas les 200 millions, il est prévu de les prélever sur l'aide aux investissements de la SNCB en 2006. Parallèlement, le fonds RER ne reçoit que 51 millions d'euros, alors que le montant prévu était de 120 millions.

Selon nos informations, il est prévu de sceller les statuts des nouvelles structures chez le notaire le 22 octobre, ce qui suppose que d'ici là, des tractations politiques pour désigner les dirigeants. L'actuel directeur financier de la SNCB, Luc Lallemand devrait être nommé à la tête d'Infrabel et Karel Vinck (actuel patron de la SNCB) confirmer à la tête du holding.